Overblog
Editer la page Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Fraternité Bible

Paroisse St-Quentin - St-Victor

Enseignement n°1

Le Pentateuque

Nous commençons donc aujourd’hui notre parcours avec le début de l’Ancien Testament, nous pourrions dire même le fondement, la Torah ou Pentateuque, les cinq premiers livres de la Bible. Pour un juif, comme pour un chrétien, nous avons là le fondement. C’est comme le noyau d’un fruit à partir duquel la graine, puis la plante puis l’arbre va pouvoir pousser et à son tour donner du fruit.

Comme pour chaque séance nous procéderons en essayant d’avoir d’abord une vue générale et ensuite de nous arrêter à quelques points particuliers.

a) Qu’est-ce que la Torah ?

Pour comprendre ce qu’est la Torah il est utile d’avoir quelques notions sur le contexte dans lequel ces textes ont été rédigés.

Pour une large part ces textes ont été mis par écrit au VIème siècle avant Jésus-Christ, alors que le peuple élu était en exil à Babylone. Reprenons un peu d’histoire :

Le peuple d’Israël a pour ancêtre les patriarches : Abraham, Isaac et Jacob, que vous avez rencontrés dans le livre de la Genèse. Jacob, qui a aussi pour nom Israël, est le père de 12 hommes, fondateurs des 12 tribus d’Israël. On peut considérer que ces personnages ont vécu entre 1800 et 1600 avant Jésus-Christ. A la mort de Jacob (la fin de la Genèse) suite à une famille, le peuple s’est réfugié en Égypte. Progressivement ils ont été réduit en esclavage, jusqu’à une situation qui n’était plus supportable sous Ramses II. Sous son règne, soit vers 1250 le peuple s’est enfui et a traversé le désert pour revenir dans sa terre promise. Entre 1200 et 1000 avant Jésus le peuple s’est installé dans la Terre Promise. Ils n’avaient pas de roi, mais des juges qui gouvernaient de manière assez légère le peuple. Environ autour de 1000 le peuple s’est organisé différemment en se donnant un roi, d’abord Saül puis David et son fils Salomon. Ces trois rois ont gouverné l’ensemble des 12 tribus. A la mort de Salomon, en 930, a eu lieu un schisme. 10 tribus du nord ont fondé le Royaume du Nord, appelé aussi Israël, et deux tribus du Sud ont continué, avec un descendant de David comme roi, le royaume du Sud, appelé aussi Juda. Deux siècles plus tard, en 720, les Assyriens, peuple venu du Nord, ont mis fin au royaume du Nord et ont dispersé ses habitants. Le royaume de Juda, lui, a survécu, jusqu’en 587. Là ce sont les Babyloniens qui ont conquis Juda et ont emmené une partie du peuple en déportation à Babylone. C’est le drame majeur de l’histoire du peuple juif. Dieu avait promis un peuple nombreux, un roi, une terre, un lieu où adorer Dieu. Le temple est détruit, il n’y a plus de roi, il n’y a plus de terre.

Cette situation dramatique conduit le peuple à une vraie interrogation : pourquoi Dieu nous a-t-il conduit jusque-là ? Quel est le sens de cette épreuve ? C’est surtout au fond de cette crise d’identité que le peuple éprouve le besoin d’écrire son histoire. En écrivant son histoire, il pourra mettre des mots sur son identité et sa relation avec Dieu.

Pour écrire bien sûr, le peuple puise dans ses longues traditions. Comme tous les peuples où l’écriture ne s’est pas encore répandue d’une manière très large on fonctionne beaucoup sur les traditions orales et sur la mémoire. Les histoires sont racontées, répétées, combinées, enrichies. Le peuple puise aussi dans les trésors des traditions des peuples environnants, à Babylone ou en Égypte. Le résultat est comme le document d’identité du peuple juif : cette histoire nous dit qui nous sommes.

b) Ces textes sont-ils historiques ?

Lorsque nous lisons les textes bibliques, en particulier ce qui nous rapportent les épisodes les plus anciens, nous nous posons souvent la question de l’historicité : est-ce que ces faits ont vraiment eu lieu et à la manière dont ils sont racontés ?

Si nous nous posons cette question c’est parce que, en particulier dans notre contexte occidental, nous sommes très marqués par cette question de l’exactitude historique. Nous voudrions savoir, ce qui s’est passé exactement. En réalité c’est impossible. Si vous avez été impliqués hier dans un accident de voiture il est impossible de remonter au fait exact. Nous aurons des éléments mais le fait précis a déjà disparu dans le passé. Vous pouvez aujourd’hui avoir différentes interprétation de l’événement : l’interprétation de la victime ou celle du coupable, celle du journaliste, celle du pompier, celle de l’assureur ou celle du policier. On ne peut rejoindre des faits qu’à partir de leur interprétation et en réalité nous ne faisons que nous constituer à nous-mêmes notre propre interprétation : je me construit mon interprétation de l’accident de voiture. Cela ne diminue pas l’importance du fait ; s’il n’y avait pas eu d’accident il n’y aurait pas d’interprétation. Celui qui affirmerait que, étant donné qu’il n’y a que des interprétations de l’accident, on n’est pas sûr qu’il y a eu un accident, dirait quelque chose d’absurde. L’existence d’interprétation, de récits, suppose un fait. Par rapport à la Bible nous sommes dans la même question. Nous n’avons que des interprétations d’évènements. Mais la bonne nouvelle c’est que c’est cette interprétation qui est la plus importante.

Nous l’avons vu à l’instant, l’histoire d’Abraham, Isaac et Jacob a été mise par écrit environ 1000 ans après la vie des patriarches. Imaginez que vous ayez à raconter aujourd’hui l’histoire de Charlemagne sans disposer de livres ou d’outils informatiques ! Vous ne pourriez sans doute pas dire exactement ce que Charlemagne a vécu mais vous pourriez très bien dire, avec un minimum de culture, en quoi sa vie et son action ont été importantes pour ce que nous sommes aujourd’hui.

Lorsque nous lisons la Genèse nous ne sommes pas mis directement en face de faits historiques au sens moderne du terme. Il y a eu des patriarches, il y a eu une histoire fondatrice du peuple. Et lorsque nous lisons la Genèse nous n’avons peut-être pas les faits précis mais nous avons les éléments qui nous permettent de dire qui est le peuple d’Israël et qui nous sommes nous, aujourd’hui, descendants selon la foi d’Abraham.

c) Vue d’ensemble du Pentateuque

Après ces éléments introductifs, regardons dans les grandes lignes la Torah.

Le livre de la Genèse est un peu à part dans l’ensemble du Pentateuque. Les quatre livres suivants disent l’histoire d’Israël entre sa sortie d’Égypte et son entrée dans la terre promise. La Genèse entend traiter tout ce qui a eu lieu avant.

La Genèse est constituée de 50 chapitres, ce qui en fait un livre assez long.

Les 11 premiers chapitres disent les origines. De manière intéressante, avant de s’intéresser au peuple lui-même, Israël, on resitue ce peuple dans une histoire plus large, celle de toute l’humanité. Tous les peuples de la terre sont descendants, d’une manière ou d’une autre d’Adam. L’histoire d’Israël est intégrée dans celle des nations. Israël est un peuple distinct des autres nations, mais il n’est pas isolé. Israël n’ignore pas les autres peuples, ce qui est le cas dans certains récits analogues du moyen-orient. Ces chapitres disent les débuts complexes de la relation entre Dieu et son peuple.

Dieu a fait l’homme pour qu’il vive en harmonie avec lui. C’est ce que nous avons vu dans les récits de la création. Mais l’homme a désobéi, signifiant ainsi son refus de vivre pleinement l’alliance. La conséquence en est une prolifération du péché qui conduit à des épisodes comme le déluge (ch. 6-9) ou la tour de Babylone (ch. 11).

A partir du ch. 12 nous nous focalisons sur l’une des familles de la terre, celle d’Abraham. Abraham est choisi par Dieu. Il reçoit la mission d’être la bénédiction pour toutes les nations de la terre. Vous avez lu ce texte de l’appel d’Abraham. C’est le mode d’action de Dieu. Pour permettre au peuple de vivre dans l’alliance, de retourner dans cette alliance, Dieu décide de s’adresser aux hommes non pas individuellement mais en passant les uns par les autres. Dieu choisit le peuple d’Abraham pour se révéler à toute l’humanité. A l’intérieur même du peuple Dieu choisira des hommes particuliers, rois, prêtres, prophètes, pour se révéler à l’ensemble du peuple. On appelle ça le mystère de l’élection. Dieu se constitue un peuple.

La deuxième partie de la Genèse (ch. 12-50) est constituée de trois « cycles » : on s’intéresse successivement à trois personnages : Abraham, avec dans l’ombre d’Abraham Isaac (ch. 12-25), Jacob (ch. 25-36) et Joseph (ch. 37-50).

Abraham est celui qui apprend à se laisser guider par Dieu. S’il y a un mot qui résume l’attitude d’Abraham, c’est celui de la foi : « Abraham crut dans le SEIGNEUR qui le lui compta comme justice. » (Gn 15,6). L’épisode du sacrifice d’Isaac est là précisément pour montrer comment Abraham va jusqu’au bout de cette confiance envers Dieu. Le but de ce texte n’est évidemment pas de dire que Dieu pourrait vouloir tuer des enfants, ni même que Dieu nous enverrait des épreuves pour nous tester (cf. l’introduction dans laquelle j’évoquais le « bon sens »). Il est là pour nous montrer à quel point Abraham est allé loin dans cette confiance en Dieu.

Avec Jacob (ch. 25-36) nous voyons un personnage très humain. Il est proche de nous. C’est un personnage qui est marqué, comme nous, par une forme d’ambiguïté. Lorsqu’il rencontre Dieu à Béthel (ch. 28 que vous avez lu) nous avons à la fois l’histoire d’une belle révélation de Dieu et d’une certaine confiance, mais aussi pour une part une forme de marchandage : si Dieu est bien avec moi, alors je lui paierai la dîme ! Jacob, entre autre, nous montre que la révélation de Dieu se fait bien à l’intérieur d’une histoire humaine, et même très humaine. Les épisodes de la vie de Jacob ne sont pas tous moralement défendables !

L’histoire de Jacob, avec de beaux aspects mais aussi d’autres plus ténébreux, connaît des répercussions dans sa famille. C’est l’objet du troisième cycle (ch. 37-50) qui nous rapporte les dissensions à l’intérieur de sa famille. Jacob est un homme qui peine à assumer sa paternité, ses fils se déchirent, notamment à cause de la préférence qu’il accorde à son 11ème fils, Joseph, qu’il a eu de son épouse préférée, Rachel. Ces tensions vont jusqu’au désir de meurtre. Les frères de Joseph l’auraient tué si une caravane de bédouins n’était passée par là au bon moment. Il y a plus de profit à vendre qu’à tuer. Joseph est donc emmené en Égypte où il va connaître d’abord de grandes difficultés jusqu’à moisir en prison, mais finalement les choses s’arrangent grâce à sa capacité à interpréter les songes. Il devient ainsi ministre du pharaon, chargé de gérer les stocks de grains en vue d’une famine. C’est à l’occasion de cette famine que le reste de la famille de Jacob est contrainte de venir se réfugier en Égypte. Joseph, vendu par ses frères, devient paradoxalement celui qui les sauve. De la même manière Jésus, tué par les hommes, deviendra paradoxalement celui qui nous sauve.

Le livre de l’Exode commence bien longtemps après. Le peuple est désormais nombreux, toujours en Égypte. Pharaon s’inquiète et instaure des mesures de précautions. Le peuple est réduit en esclavage. Devant l’inutilité de cette mesure il préconise la suppression de tous les garçons qui naissent. Un enfant hébreu, qui aurait du être concerné par cette mesure, échappe au massacre et devient même prince d’Égypte. C’est Moïse. La situation s’inverse cependant lorsque Moïse tue, un peu par accident, un contremaître égyptien. Il s’enfuie au désert où il rencontre Dieu dans le buisson ardent. Dieu se révèle à lui et lui donne la mission de faire sortir le peuple d’Égypte. Au terme de longues péripéties le peuple sort effectivement en traversant la mer rouge (Ex 12-14). C’est ce qu’on appelle la Pâque, l’événement fondateur de l’histoire du peuple d’Israël. Qui est le peuple d’Israël : le peuple sauvé par Dieu des égyptiens.

Le séjour d’Israël au désert dure longtemps, 40 ans. Non que la route soit longue – une quinzaine de jours auraient du suffire – mais plutôt le temps pour le peuple d’apprendre à devenir le peuple de Dieu. Les nombreuses lois que Dieu donne, à commencer par les dix commandements (Ex 20) doivent permettre au peuple de vivre comme peuple de l’alliance. Comme dans les premières pages de la Genèse, l’action bienveillante de Dieu est très vite suivie de nombreuses rebellions, la plus emblématique d’entre elles étant celle de la construction du veau d’or.

Le troisième livre de la Torah, le Lévitique, est un livre qui peut nous sembler un peu obscur. Il contient principalement des règles cultuelles dont nous peinons à comprendre la portée pour nous aujourd’hui. Il vaut la peine par conséquent de dire quelque chose sur ces règles de pureté.

Le peuple d’Israël se construit dans le désert autour de l’arche de l’alliance. Celle-ci contient entre autres les tables de la loi, c’est-à-dire la parole de Dieu. Elle est entreposée dans le « saint des saints » c’est-à-dire la partie la plus sacrée d’un ensemble plus vaste qui est la tente de la rencontre. Dans cette tente n’entrent que les prêtres à des occasions particulières. Dans le saints des saints ce n’est que le grand prêtre qui entre une fois dans l’année le jour du pardon. Autour de cette tente un parvis, réservé aux prêtres – les prêtres sont les hommes de la tribu de Lévi, fils de Jacob. Les tribus d’Israël, dans le désert, sont réparties autour de cette tente de la rencontre. On a ainsi comme des cercles concentriques. Cette structure sera reproduite dans la terre promise : la terre promise est organisée autour d’un centre, le saint des saints, qui se trouve dans le temple, dont la partie construite s’appelle le « saint ». Celui-ci est entouré d’un parvis. L’ensemble du peuple d’Israël est structuré autour de ce centre, lieu de la sainteté maximal.

Ce n’est pas en soi l’arche de l’alliance qui est importante. Nous aurons l’occasion de voir (cf. 1Sa 4-6) que celle-ci peut-être parfois idolâtrée. D’ailleurs en 587 cette arche de l’alliance disparaît. A l’époque de Jésus, le saint des saints n’est qu’une pièce vide. Ou plutôt, le saint des saints est le lieu de la présence invisible de Dieu. On parle parfois de la gloire de Dieu. Dieu habite, d’une manière qui n’est ni matérielle, ni visible, dans le saint des saints.

Pour s’approcher de la présence de Dieu il y a certaines règles à respecter, des règles de pureté. En gros, plus vous vous approchez de la présence de Dieu, plus vous franchissez ces cercles concentriques, plus vous devez respecter ces règles de pureté. La pureté peut être obtenue par des bains de purifications ou des sacrifices. Une partie de la pureté rituelle est aussi liée à un état. Tout le monde n’est pas grand-prêtre, tout le monde n’est pas prêtre. Il y a également une distinction entre homme et femme. La pureté n’est pas d’abord morale. Jésus n’est pas toujours dans un état de pureté maximale. Il n’a jamais péchés mais il a du toucher des objets ou des personnes qui l’ont rendu impur. Il a dû par conséquent accomplir des rites de purifications qui lui permettaient notamment de participer au culte du temple. Être impur n’est pas un péché ! Il y a cependant une correspondance. La pureté rituelle doit être comme un reflet de la pureté morale. Les prophètes insisteront beaucoup sur cette correspondance entre les deux. Ils dénonceront par exemple très largement ceux qui offrent des sacrifices mais commettent des meurtres. La pureté rituelle devrait rendre visible extérieurement une pureté morale qui, par définition ne se voit pas.

Dans notre vie chrétienne les règles du lévitique n’ont plus cours. Même chez les juifs la plupart sont caduques dans la mesure où elle suppose l’existence du temple, désormais détruit depuis l’an 70 de notre ère. Mais nous voyons bien comment ces règles peuvent se traduire pour nous aujourd’hui. Elles sont une invitation au respect de la sainteté de Dieu tout en invitant à se rapprocher de cette présence insaisissable. D’une certaine manière les sacrements que nous vivons jouent le rôle des sacrifices. Ils rendent visible une réalité invisible, ils permettent de faire vivre la communion avec Dieu. Jésus cite à plusieurs reprises une phrase qui est centrale, répétée à de nombreuses reprises dans le Lévitique : « Soyez saint, car moi le Seigneur je suis saint. » L’enjeu est de s’approcher de la sainteté de Dieu ou plutôt de se laisser gagner par la sainteté de Dieu.

Le livre des Nombres est celui qui condense les 40 années de séjour au désert. Le livre de l’Exode en effet s’était intéressé aux évènements des premières semaines après la sortie d’Égypte. Le livre du Deutéronome, lui, se situera au seuil de l’entrée dans la terre promise. Il reprend un certain nombre de règles, plus sociales que rituelles et fait la liste des infidélités du peuple d’Israël. Les différentes étapes dans le désert montre le parcours complexe du peuple ; la géographie dans ce cas exprime les difficultés intérieures du peuple à entrer dans la terre, symbole de l’alliance avec Dieu.

Dans la géographie du proche orient il y a principalement deux routes. La route la plus naturelle est celle qui longe la côte, la route de la mer. Après les premières révoltes Dieu avait empêché l’accès par la route de la mer et Israël emprunte la route plus complexe appelée route royale, qui traverse les plateaux à l’est du Jourdain, l’actuelle Jordanie. Israël se comprend aidé par Dieu, notamment dans l’épisode de Balaam. Ce prophète païen, un mage d’orient, est appelé pour maudire Israël. A son insu il se sent poussé par Dieu à bénir Israël dans des scènes qui ne manquent pas d’humour.

Le livre du Deutéronome lui est à part. Il constitue comme un arrêt sur image. Le peuple se trouve juste de l’autre côté du Jourdain, en face de Jéricho. Tout le livre du Deutéronome se déroule en une journée, celle de la mort de Moïse. Il s’agit essentiellement des discours de Moïse. Moïse y fait une relecture des 40 années passées dans le désert pour que le peuple puisse en tirer les conséquences à l’heure de l’installation dans la terre promise. C’est d’ailleurs la signification même du nom de ce livre : Deutéronome – 2ème loi. Non pas qu’il s’agisse d’une autre loi, mais plutôt d’une actualisation de la loi. Il s’agit de redire, pour la génération qui n’a pas connu la sortie d’Égypte et le don de la loi, cette même loi dans des termes actualisés. L’ensemble de l’Écriture fonctionne ainsi : il s’agit de redire, avec des mots actuels et appropriés, la même réalité fondamentale.

Le Deutéronome contient, dans la bouche de Moïse, ce qui est le Credo fondamental d’Israël : « Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est l’Unique. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force. Ces paroles que je te donne aujourd’hui resteront dans ton cœur. Tu les rediras à tes fils, tu les répéteras sans cesse, à la maison ou en voyage, que tu sois couché ou que tu sois levé ; tu les attacheras à ton poignet comme un signe, elles seront un bandeau sur ton front, tu les inscriras à l’entrée de ta maison et aux portes de ta ville. » (Dt 6). L’enjeu pour Israël, et c’est déjà la fonction du Deutéronome, est d’enraciner en nous cette parole.

Le livre du Deutéronome se termine avec la mort de Moïse. Dieu emmène Moïse sur une montagne, toujours de l’autre côté du Jourdain, d’où il lui fait voir toute la terre promise. Moïse meurt, et, nous dit le texte, c’est Dieu lui-même qui l’enterre. Traitement tout-à-fait particulier qui entoure Moïse d’une dose de mystère, ce qui permettra sans doute à Moïse de revenir plus facilement. C’est d’ailleurs ce que Moïse a promis avant de mourir : « le Seigneur ton Dieu suscitera pour toi, du milieu de toi, un prophète comme moi, que vous écouterez. » (Dt 18,15)

d) Parole de Dieu, parole de l’Homme

Pour conclure rappelons simplement que la Bible est autant Parole de Dieu que Parole de l’Homme.

L’introduction historique que nous avons faite nous dit bien que la Bible est écrite par des hommes. Ces hommes, bien sûr ont été inspirés, mais ils ont agi en vrais auteurs. Ils n’ont pas été « possédés » par Dieu où ils n’ont pas écrit sur la dictée. Ils ont écrit en laissant Dieu parler à l’intérieur d’eux-mêmes, mais en pleine possession de leurs moyens.

C’est peut-être ce qui nous donne l’impression de certaines imprécisions dans la Bible, mais c’est surtout ce qui en fait sa richesse. Ces hommes ont été capables, nous avons commencé à le voir, surtout dans le Deutéronome, de voir, dans leur histoire la présence de Dieu. La Bible est la lecture que ces hommes ont fait de la présence de Dieu dans leur histoire.

L’enjeu, nous l’avons aussi souligné, est de permettre à l’homme de vivre l’alliance avec Dieu. Une alliance, par définition, ne peut se faire que par un plein engagement des deux parties. La Bible le manifeste déjà : elle est entièrement une histoire humaine et entièrement une histoire divine. Elle est entièrement écrite par des hommes et entièrement écrite par Dieu.

Cette expérience est aussi le miroir de notre propre expérience. Lire la Bible demande de nous que nous le fassions avec toutes nos capacités. La Bible nous parlera dans la mesure où nous l’aborderons avec tout ce que nous sommes : notre intelligence, notre sensibilité, notre mémoire, notre affectivité… Faisons appel à tout ce que nous sommes pour lire la Bible et surtout pour la laisser nous parler.

Partager cette page
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :